Un cas contemporain “d’aberration écologique” : le Qatar et son  encadrement du mondial 2022 

Sepp Blatter, ancien président de la Fifa, a annoncé mardi 8 novembre dans un discours prononcé à Zurich, que l’attribution du mondial de football au Qatar était une “erreur”. 

 Événement datant de fin 2010, le pays de la péninsule arabique se voit confier une importante responsabilité, initiative déjà critiquée dès le début de la décennie du fait d’une incapacité initiale à organiser l’évènement. En regrettant ce choix au détriment des Etats-Unis, l’ancien président met alors en avant un enjeu symbolique : celui d’une réconciliation avec la Russie. Il affirme ainsi que “cela aurait pu être un geste de paix si les deux adversaires politiques avaient organisé la Coupe du monde l’un après l’autre.” Néanmoins, l’ancien président de la Fifa semble éviter la mention des réelles sources de contestation, cela n’étant pas sur ces considérations symboliques que s’embrase le débat public autour de l’attribution du mondial au Qatar. En effet, la Coupe du Monde de 2022 est jalonnée par des critiques d’une toute autre nature, qualifiée d’aberration écologique.

Les navettes aériennes : scandale et désastre écologique.

Une problématique pour l’Etat qatari : l’accueil des visiteurs.

Le Qatar s’apprête à accueillir sur son territoire l’un des évènements sportifs les plus importants de cette année : la coupe du monde de football. A l’occasion de cet évènement, ce pays du Moyen-Orient, à peine plus grand que la Corse, se prépare à recevoir un total de 1,2 million de supporters selon l’organisme public Dubai Sports Council. La question de l’accueil et du logement de ces touristes est donc nécessairement, et depuis quelques années, au cœur des réflexions des organisateurs de l’événement. En effet, le Qatar, étant donné sa superficie et ses infrastructures, n’est absolument pas capable d’accueillir l’ensemble des visiteurs sur son territoire : on compte aujourd’hui environ 90 000 chambres d’hôtels disponibles, chiffre bien inférieur aux 1,2 millions de supporters attendus. Pour pallier ce problème, les organisateurs ont donc choisi une solution particulière et relativement inédite : loger la plupart des visiteurs dans les pays voisins, notamment aux Emirats arabes unis. Mais cette solution pose une nouvelle question sur les trajets entre les pays frontaliers et Doha, capitale du Qatar où se déroulera la compétition. C’est ainsi que fut proposée une ultime solution, aussi aberrante que désastreuse écologiquement : réaliser des trajets en avion.

L’utilisation de navettes aériennes : un désastre écologique ignoré par les transporteurs.

Le transport aérien, voilà donc la solution miracle trouvée par le Qatar pour permettre à tous les visiteurs de faire les trajets quotidiens entre Doha et leur hôtel. Il serait ainsi attendu, selon les estimations, plus de 160 vols par jour, c’est-à-dire un toutes les dix minutes. Sachant qu’un vol Doha-Dubaï consomme environ et selon les estimations les plus basses, 251 kg CO2e, on peut rapidement calculer les émissions de gaz à effet de serre prévues pour la coupe du monde. En multipliant ce nombre par le nombre de vols par jour (160 en moyenne) et par le nombre de jours (29 au total), on arrive à un total de plus de 1,1 million de kilos de CO2 et gaz équivalent CO2.

Si atteindre de tels chiffres est possible, c’est en partie dû à la coopération effective des compagnies aériennes et des transporteurs nationaux avec l’Etat qatari. Ghaith Al Ghaith, directeur général de la compagnie aérienne FlyDubai, a par exemple annoncé dans un communiqué de presse que la compagnie proposerait jusqu’à trente vols allers-retours chaque jour entre Doha et Dubaï le temps de la coupe du monde. Et pour favoriser l’usage de l’avion, ces transporteurs ont d’ailleurs créé une pack “Match Day Shuttle” permettant de faire l’aller-retour dans une journée contre la modique somme de 258$ en classe économique.

Interpellées sur l’impact environnemental de leurs navettes aériennes par des journalistes, les entreprises ont préféré éviter les questions, évitant d’assumer une quelconque responsabilité dans le désastre écologique dont elles deviennent responsables. La compagnie FlyDubai par exemple, après avoir été contactées à plusieurs reprises, a préféré éluder les questions en redirigeant les journalistes vers un communiqué de presse censé contenir “toutes les informations relatives à notre service de navette quotidien depuis l’aéroport DWC”, communiqué où il n’est évidemment fait nulle part mention de l’impact environnemental. D’autres compagnies comme Kuwait Airways ont également été contactées, préférant rester dans le flou. Quand les journalistes relèvent l’aberration écologique des lignes aériennes, une assistance commerciale finit simplement par répondre “On ne m’en a pas parlé”.

Une désillusion pour les défenseurs de l’environnement

Suite à l’annonce des prévisions concernant ses navettes et face aux réponses des compagnies, une déferlante de vives réactions ont été entraînées pour les différentes associations environnementales et ONG. Jean-François Julliard par exemple, directeur général de l’ONG GreenPeace, tweetait à cet égard : “Ces vols navettes sont une preuve de plus, s’il en fallait, du non-sens de la @FIFAWorldCup au niveau écologique. La neutralité carbone mise en avant par les organisateurs au Qatar n’est pas une réponse à l’urgence climatique et doit être considérée comme du greenwashing.” La tête d’une des plus importantes ONG environnementales avait de plus déclaré auprès des journalistes L’OBS que “la prétention du Qatar à être la Coupe du Monde la plus compacte de l’histoire est une fois de plus à mal”.

Depuis le début de la polémique, les articles et revues dénonçant le scandale se multiplient, notamment avec l’arrivée imminente de l’évènement. Pourtant, aucune réaction de la part de l’Etat qatari ou des différentes compagnies n’a été observée, préférant nier une vérité qui dérange, mais au prix d’un nouveau désastre pour l’environnement.

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